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Automne 2017

Des peintures vieilles de 5700 ans

Adelphine Bonneau a contribué à la datation précise de peintures rupestres dans le sud du continent africain.

Pour la première fois, une équipe d’archéologues a réussi à dater de manière fiable des peintures réalisées il y a plus de 5000  ans sur des parois rocheuses du sud de l’Afrique, notamment grâce à des analyses réalisées à l’Université Laval. La nouvelle a paru dans la revue savante Antiquity.

«L’étude sur le terrain a été effectuée durant mon doctorat par une équipe de recherche que je dirigeais, explique Adelphine Bonneau, actuellement chercheuse postdoctorale au Laboratoire d’archéologie historique de l’Université Laval et auteure principale de l’article. Nous avons étudié une soixantaine de sites en Afrique du Sud, au Lesotho et au Botswana. Nous avons daté 14 sites dans des lieux isolés, des abris sous roche dont les renfoncements ont relativement bien protégé les peintures au cours des siècles. Les peintures monochromes et polychromes datées ont 5700  ans pour les plus anciennes. Les artistes appartenaient au peuple San, des chasseurs-cueilleurs.»

Dans le sud de l’Afrique, déterminer l’âge précis d’une peinture préhistorique a toujours représenté un défi pour les archéologues. Après une aussi longue période, des contaminants, comme des bactéries, ou des altérations dues aux intempéries ont recouvert la peinture à la façon d’un vernis. Si les contaminants comprennent du carbone, celui-ci peut nuire à la procédure de datation qui se fait à l’aide de carbone  14. Par ailleurs, la peinture elle-même peut ne pas contenir suffisamment de carbone pour la datation.

Les chercheurs ont innové en définissant des protocoles rigoureux. Leur approche touchait à la collecte des échantillons, à la caractérisation des échantillons de peinture et à la préparation en vue de la datation au carbone  14. Ces étapes se sont déroulées entre les sites préhistoriques et des laboratoires d’Afrique du Sud, d’Angleterre et du Québec. D’abord, ils ont prélevé de minuscules échantillons, de la taille d’une tête d’épingle. Ensuite, ils ont déterminé leur composition physicochimique en laboratoire. S’il y avait présence de carbone, on prélevait un plus grand échantillon pour analyse. L’étape suivante a consisté à débarrasser la peinture de ses contaminants de surface. Ne restait alors que la datation, qui s’est effectuée à l’Université d’Oxford.

Comprendre les couleurs
Adelphine Bonneau était alors membre du Groupe de recherche en archéométrie de l’Université Laval. À ce titre, elle a pu utiliser, pour une partie de ses analyses, les instruments sophistiqués du Laboratoire de microanalyse du Département de géologie et de génie géologique. «Je voulais comprendre comment les artistes San avaient travaillé leurs matières premières, souligne-t-elle. Les grains qui composaient la peinture étaient-ils fins et homogènes? J’ai aussi pu déterminer quels éléments chimiques se trouvaient dans l’échantillon, notamment l’oxyde de fer pour les rouges et les jaunes.»

Les couleurs dominantes sont le rouge, le jaune et le blanc, ainsi qu’un peu de noir. «Le rouge et le jaune adhèrent bien et longtemps à une paroi rocheuse, indique la post­doctorante. Pour leur palette, les artistes San savaient quoi aller chercher. Il existait plusieurs argiles différentes pour les nuances de rouge. Le blanc provenait d’argile blanche, mais aussi de la craie et du plâtre. Le noir, lui, était tiré du charbon, de la suie et de la graisse brûlée.»

Sur les parois rocheuses étudiées, les artistes du lointain passé ont représenté différentes espèces animales de la savane, en particulier des antilopes appelées élands. Des humains sont également reconnaissables. «On va de la figure humaine de 3  cm de haut à des animaux de 5 m de long par 3  m de haut, dit-elle. C’est très épars et très hétérogène. On voit également plusieurs superpositions: à certains endroits, on compte 5 ou 6 peintures les unes sur les autres.»

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