Les Sherlock Holmes du champagne
Trois chercheurs font la lumière sur le contenu de bouteilles d’alcool provenant de l’Empress of Ireland.
Par Jean Hamann
Des bouteilles trouvées dans l’épave de l’Empress of Ireland ont livré une partie de leurs secrets grâce à Normand Voyer, à Dominic Larivière et à Pablo Lebed, du Département de chimie. Ce sont les responsables du Musée maritime du Québec, à L’Islet-sur-Mer, qui leur ont demandé de procéder à cette investigation à l’occasion du centenaire du naufrage de ce grand transatlantique.
Bouteilles à la mer
L’Empress of Ireland est entré en collision avec un charbonnier norvégien au large de Rimouski dans la nuit du 29 mai 1914, faisant 1012 victimes. Depuis, de nombreuses bouteilles ont été ramenées à la surface par des plongeurs, après avoir passé plus d’un demi-siècle sous l’eau. Aucune étiquette ne permet d’en établir le contenu, mais leur forme suggère qu’il s’agissait de vin et de bière. Impossible de conclure quoi que ce soit à partir des tests organoleptiques, pas plus que de l’analyse des matières organiques, altérées par les ans. «Leur goût se situe quelque part entre le vinaigre et le décapant», commente Normand Voyer.
Quatre de ces bouteilles appartenant au musée maritime ont donc été confiées aux chimistes. «Nous nous sommes tournés vers l’analyse des minéraux, rapporte le chercheur. Leur abondance reflète le type de végétaux utilisés pour la fabrication du produit et, dans certains cas, le type de sol dans lequel ces plantes ont poussé.»
Résultats? «Deux des bouteilles sont des champagnes. Comme il s’agit d’appellation contrôlée, la fabrication des champagnes est très standardisée ce qui nous a permis d’établir qu’il s’agit d’un Lanson, fabriqué dans la région de Reims, et d’un Moët et Chandon, provenant d’Épernay.» Les deux autres bouteilles sont des bières, mais leur lieu de production n’a pu être déterminé. «Par contre, à partir des minéraux contenus dans les différents grains qui ont servi à leur fabrication, nous savons qu’il s’agit d’une cream ale anglaise ou irlandaise, comme la Newcastle ou la Smithwick’s, et d’une pilsner, comme la Grolsh ou l’Amstel.»
Les trois chimistes comptent par ailleurs publier un article scientifique sur la méthode d’analyse qu’ils ont mise au point et qui pourrait rendre d’autres services, lors de fouilles archéologiques.
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