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L’obésité au Canada: une mise à jour

Le 1er août dernier, Statistique Canada publiait des données actualisées sur la prévalence de l’obésité au Canada. On y apprenait entre autres que l’obésité chez les adultes continue à progresser. Par contre, chez les enfants, la prévalence est à la baisse. J’ai été apparemment un peu naïve de penser que cette bonne nouvelle pour notre jeunesse ferait les manchettes. Près de 2 mois plus tard, j’en suis à me demander si ce silence radio concernant cette nouvelle qui devrait nous réjouir s’explique par une crainte de miner l’intérêt pour l’obésité. Si l’on donne l’impression d’être sur la bonne voie, risque-t-on de perdre des appuis importants pour la lutte à l’obésité? 

obesite

L’enquête de santé dans les collectivités canadiennes
Les données sur la prévalence de l’obésité qui sortent tout juste du four proviennent de la version 2015 de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC). Cette enquête vise à colliger des renseignements sur l’état de santé des Canadiens et ses déterminants ainsi que sur leur utilisation des services. Des données de base sont recueillies tous les 2 ans chez un échantillon représentatif. Quant aux données plus onéreuses à obtenir, elles sont collectées à un intervalle beaucoup plus long. C’est le cas des données concernant les mesures de poids et de taille dont la dernière cueillette remontait à 2004. 

Quelques notions relatives à la méthodologie
Rappelons tout d’abord que, lorsqu’on parle de prévalence d’obésité chez les adultes, on réfère à un indice de masse corporelle d’au moins 30 kg/m2. Cet indicateur est loin d’être parfait, mais sa mesure est assez simple à standardiser et son utilisation à l’échelle mondiale permet des comparaisons entre différents groupes de la population en plus de faciliter le suivi de la situation dans le temps. Chez les enfants, on utilise la courbe de croissance de l’Organisation mondiale de la santé qui met en lien l’indice de masse corporelle et l’âge. Il a été établi qu’une valeur d’indice de masse corporelle pour l’âge se trouvant au 97e percentile ou plus correspond à un état d’obésité. 

Les grandes tendances entre 2004 et 2015
En 2004, 23,1% des adultes1 canadiens étaient obèses. Cette prévalence s’est accrue dans la décennie suivante puisqu’en 2015 elle s’élève à 26,7%. Chez les jeunes2 de 5 à 17 ans, la prévalence d’obésité est passée de 13,3 à 12%. 

J’insiste sur le fait que ces taux d’obésité ont été obtenus à partir de valeurs de poids et de taille mesurées par les enquêteurs. Cela peut sembler un détail méthodologique, mais ce n’en est pas un. Les valeurs seraient très différentes si on avait fait les calculs à partir de données auto-rapportées. À ce sujet, on constate que, lorsqu’on demande aux gens leur poids et leur taille, ils ont tendance à sous-rapporter leur poids et à se grandir un peu. En divisant un numérateur allégé par un dénominateur gonflé, on se retrouve avec des valeurs d’indice de masse corporelle sous-estimées. Par exemple, l’ESCC réalisée en 2014 comprenait des données sur les valeurs auto-rapportées d’indice de masse corporelle. Selon ces chiffres, on concluait que 20,1% des adultes canadiens étaient obèses en 2014, une valeur plus basse que celle mesurée en 2004 (23,1%) et évidemment plus basse que celle de 2015 (26,7%). Cette importante caractéristique méthodologique n’est malheureusement pas toujours précisée lors de la diffusion des données sur l’obésité, ce qui peut nous donner une mauvaise impression et rendre difficile la réconciliation des données publiées au fil des ans. 

L’intérêt dans les différences
La richesse des données de l’ESCC réside selon moi dans les différences qu’on observe entre les provinces, les groupes d’âge et entre les sexes. En effet, derrière une augmentation globale de 3,6 points de pourcentage chez les adultes se cachent plusieurs disparités. 

On constate tout d’abord que l’augmentation chez les hommes (de 22,9% en 2004 à 28,7% en 2015) est plus importante que chez les femmes (de 23,2 % à 24,7%). Des différences marquantes entre les provinces sont également observées. Alors que le Québec démontre la plus faible augmentation du taux d’obésité au fil des ans (de 21,8% à 23,1%), la Saskatchewan se voit décerner le titre de championne de l’augmentation (de 30,8% à 45,9%) et trône également au sommet des provinces pour le pourcentage d’obésité en 2015. 

Certaines différences entre les provinces sont également observées chez les jeunes de 5 à 17 ans. Alors que la majorité des provinces ont vu la prévalence d’obésité diminuer, on note que l’Île-du-Prince-Édouard (de 12,8% en 2004 à 16,5% en 2015), l’Alberta (de 11,3% à 12,7%) et la Saskatchewan, encore elle (de 14,2% à 19,1%), ont connu des hausses non négligeables. Le Québec, quant à lui, enregistre la plus faible prévalence d’obésité au Canada chez les jeunes en 2015 avec 10,1%, ce qui est presque 2 fois moins que la Saskatchewan qui présente la prévalence la plus élevée. 

Contrairement aux plus vieux, les garçons et les filles semblent suivre le même genre de trajectoire au fil des ans. Cependant, les filles présentent, en 2015, une prévalence d’obésité inférieure à celle des garçons (9,5% contre 14,5%), ce qui était également le cas en 2004 (10,8% contre 15,7%). 

Je termine en soulignant que le léger recul de l’obésité chez les jeunes Canadiens de 5 à 17 ans est en fait le reflet d’une diminution assez marquée chez les enfants de 5 à 11 ans (de 13,7% à 10,4%) et d’une légère augmentation chez les adolescents de 12 à 17 ans (12,9 à 13,8%). Encore une fois cependant, de grandes différences entre les provinces existent. 

Tout ce qu’il reste à savoir
Je me suis payé la traite avec ce billet de blogue. J’adore les chiffres et les statistiques! Je suis sincèrement désolée si je vous ai étourdis avec toutes ces données. Le pire, c’est que j’aurais encore tout plein de résultats à vous transmettre! Par exemple, j’aurais aussi pu vous dire que le surplus de poids est également en recul chez les jeunes et qu’on se trouve donc, en 2015, avec une très bonne proportion de nos enfants et de nos adolescents qui ont un poids normal, soit 66% des garçons et 72% des filles (on en avait respectivement 62% et 69% en 2004). 

Avec tous ces chiffres en mains, il sera intéressant de se mettre au travail pour tenter de comprendre les tendances observées. Pourquoi le Québec semble-t-il plutôt bien se tirer d’affaire? Pourquoi la Saskatchewan enregistre-t-elle les records de prévalence d’obésité? Pourquoi une telle diminution de l’obésité chez les enfants de 5 à 11 ans? 

Enfin, les bonnes nouvelles qu’on peut dégager de ce portrait ne devraient surtout pas signifier l’arrêt des efforts pour lutter contre l’obésité. On devrait plutôt voir ça comme une petite tape dans le dos qui encourage tous ceux qui travaillent à prévenir l’obésité dans notre population. 

Parce qu’il reste encore beaucoup à faire!

1 Statistique Canada. Tableau 105-2023 – Indice de masse corporelle (IMC) mesuré chez les adultes (classification selon l’Organisation mondiale de la santé), selon le groupe d’âge et le sexe, Canada et provinces, Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes – Nutrition, occasionnel, CANSIM (base de données) (site consulté le 18 septembre 2017).

2 Statistique Canada. Tableau 105-2024 – Indice de masse corporelle (IMC) mesuré chez les enfants et les jeunes (classification selon l’Organisation mondiale de la santé), selon le groupe d’âge et le sexe, Canada et provinces, Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes – Nutrition, occasionnel, CANSIM (base de données) (site consulté le 18 septembre 2017).

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  1. Publié le 25 septembre 2017 | Par Simone Lemieux

    @André Grenier. Il sera en effet très pertinent de comparer les habitudes alimentaires entre les différentes provinces. À ce sujet, l'ESCC de 2015 a également collecté des informations détaillées sur les apports en aliments. Pour l'instant, nous n'avons que des données très fragmentaires (http://bit.ly/2wgzRlz). L'analyse complète des données est en cours, et nous aurons possiblement certaines informations plus précises d'ici la fin de l'année. Il sera alors possible de comparer les habitudes alimentaires entre les provinces canadiennes et également de documenter l'évolution des habitudes alimentaires au Canada depuis 2004, date de la dernière collecte exhaustive de données sur l’alimentation.
  2. Publié le 22 septembre 2017 | Par andré grenier

    C'est peut-être le fameux modèle québécois, ou le fait qu'on serait la province la plus pauvre et qu'on n'aurait pas les moyens pour acheter de la malbouffe en quantité. Farce à part, ce serait bon de comparer ce que les Québécois mangent par rapport aux autres Canadiens.

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