La nutrition au menu
Publié le 20 septembre 2018 | Par Simone Lemieux
Nouvelle maman, nouvelles préoccupations corporelles
Ça m’attriste d’être témoin de la souffrance causée par l’insatisfaction corporelle. Bien qu’il y ait de plus en plus d’hommes touchés par cette réalité, les femmes demeurent quand même plus nombreuses à ne pas aimer l’image que leur reflète le miroir. Il semble y avoir des situations où celles-ci sont particulièrement à risque d’établir une relation pour le moins tendue avec leur corps. La grossesse et l’après–grossesse font certainement partie de ces moments de vulnérabilité.
Il y a quelque temps, j’ai lu un texte signé par Émilie Heymans, une grande dame du plongeon au Canada. Dans un témoignage touchant, cette quadruple médaillée olympique se confie sur sa difficile relation avec son corps, un rapport encore plus houleux depuis qu’elle est devenue mère.
Les exigences de la maternité
On en demande beaucoup aux femmes enceintes. Elles doivent super bien manger tout en respectant une longue liste d’aliments interdits. Ensuite, leur prise de poids doit être suffisante pour que le bébé soit assez gros, mais ne doit surtout pas dépasser la limite maximale fixée. Puis, bien sûr, elles ne doivent ni fumer ni boire une goutte d’alcool et, surtout, ne pas oublier de prendre soin d’elles, de relaxer, de rester zen et de se préparer à accueillir avec gratitude l’arrivée de bébé!
Après l’accouchement, certaines femmes perdent rapidement le poids gagné, alors que pour d’autres le processus est plutôt long. Plusieurs facteurs tels que la quantité de poids pris pendant la grossesse, l’âge, le niveau d’éducation et le poids pré-grossesse pourraient expliquer cette variabilité dans le degré de rétention du poids1.
D’un point de vue moins scientifique, j’ai par ailleurs constaté, au fil des années, qu’on utilisait beaucoup le poids de la mère pour juger de son niveau de forme après la grossesse. Une amie me confiait qu’après avoir accouché, elle souffrait de dépression post-partum et d’anémie. Pourtant, puisqu’elle avait rapidement perdu le poids pris pendant la grossesse, les gens, ne voyant que sa minceur, lui disaient à quel point elle avait l’air en forme. Incroyable, quand même, comme l’image peut nous aveugler!
On fait donc grand cas de l’image corporelle chez les nouvelles mamans. Le Web et les réseaux sociaux regorgent d’ailleurs de trucs et d’astuces pour «retrouver son corps» après voir donné naissance à bébé. Certains diront que je joue un peu trop avec les mots, mais quand on y pense, si on dit qu’on souhaite retrouver son corps, c’est donc qu’on l’aurait perdu? Est-ce qu’une femme perd vraiment son corps durant sa grossesse?
Étrangement, s’il y a un moment dans la vie d’une femme où son corps doit être fidèle au poste, c’est bien pendant et après la grossesse. La liste des tâches que celui-ci doit alors accomplir est loin d’être négligeable: porter le bébé, manger et digérer pour lui, fabriquer du lait, l’allaiter et tout le reste… ce n’est pas rien tout ça!
La foutue balance
L’insatisfaction de l’image corporelle se traduit souvent par une préoccupation excessive par rapport au poids. L’une des manifestations de cette préoccupation est l’habitude de se peser à une fréquence très élevée2. Si je reviens au témoignage d’Émilie Heymans, elle raconte à quel point sa relation avec sa balance est obsessive. Dans son cas, son passé d’athlète pratiquant un sport où l’esthétique est importante a fort probablement contribué à la relation difficile qu’elle entretient avec son poids. Dans son texte, elle confie d’ailleurs qu’elle a le réflexe de monter sur le pèse-personne plusieurs fois par jour depuis qu’elle est toute jeune. Elle mentionne avoir fait une exception dans les dernières semaines de sa seconde grossesse pour éviter de fondre en larmes en voyant le résultat. C’est dire le pouvoir que peuvent avoir les chiffres affichés sur la balance.
Plusieurs mères et plusieurs femmes se reconnaîtront dans cette relation étouffante avec le pèse-personne. J’en ai déjà parlé dans ce blogue: même si se peser peut s’avérer un élément positif chez certaines personnes qui s’engagent dans une démarche de perte de poids, la pesée excessive, quant à elle, risque d’avoir des conséquences non désirables sur l’estime de soi, les comportements alimentaires et le bien-être.
Pour terminer, j’aimerais inviter Émilie Heymans à poser un geste symbolique au nom des femmes qui, comme elle, ont une relation toxique avec la balance. J’aurais le goût de lui dire: «Émilie, monte sur la tour de 10 mètres avec ta balance et fais-lui faire un triple périlleux arrière retourné en t’assurant qu’elle touche l’eau avec le flat le plus épique qui soit!»
1 Endres LK, Straub H, McKinney C, Plunkett B, Minkovitz CS, Schetter CD, Ramey S, Wang C, Hobel C, Raju T, Shalowitz MU; Community Child Health Network of the Eunice Kennedy Shriver National Institute of Child Health and Human Development. Obstet Gynecol 2015;125:144-152. ↩
2 Klos LA, Esser VE, Kessler MM. To weigh or not to weigh: the relationship between self-weighing behavior and body image among adults. Body Image 2012; 9:551-554. ↩
Publié le 23 septembre 2018 | Par Micheline Paquet
Et j’espère qu’ Émilie Heymans verra votre merveilleux conseil .
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