La littérature pour enfants hors Québec
Dans la lignée du reportage sur la créatrice d'albums pour enfants Hélène Desputeaux, trois diplômés présentent l'état de santé de la littérature enfantine dans le coin de pays que chacun habite.
Par Marie-Eve Grondin
SÉNÉGAL: SENGHOR EST DISPARU
«Peu d’auteurs, peu d’intérêt et une invasion de livres étrangers.» Voilà le triste constat que fait Marie-Laure Josselin (Communication publique 2002; Journalisme international 2004) sur l’état de la littérature enfantine au Sénégal, le pays où elle exerce son métier de journaliste à la pige pour Radio-Canada, RDI et Libération. Il existe des programmes de lecture publique, mais même si les enseignants sénégalais encouragent la lecture à l’école, peu de parents semblent faire de même avec leurs enfants, notamment à cause de la télévision.
Pourtant, des maisons d’édition et des auteurs de la relève se manifestent sur le terrain, telle Nafissatou Dia Diouf qui a publié Le fabuleux tour du monde de Raby en 2005. Certains auteurs s’inspirent des trésors de l’oralité africaine en reprenant à l’écrit les contes de leurs pays. Toutefois, les livres pour enfants semblent plutôt avoir une vocation pédagogique: apprendre le français. Wolof, pulaar, diola, sérère: les langues locales ont la cote dans les discussions… mais toujours pas dans les livres pour enfants, remarque Marie-Laure Josselin.
Dans une librairie d’un quartier chic de Dakar, la journaliste n’a pu dénicher qu’un seul un livre en wolof, la langue la plus parlée au Sénégal. «Et s’il est difficile de se procurer des livres sénégalais pour enfants dans la capitale, en milieu rural, c’est quasiment impossible», confie-t-elle. Les parents se souviennent bien des livres sénégalais de leur enfance, comme La belle histoire de Leuk-le-lièvre, écrit par Léopold Sédar Senghor, le poète-président. «À l’époque, tous les enfants semblaient lire ces livres mais, sur la table de chevet, Leuk a cédé sa place à Dora.»
***
GABON: REDYNAMISER LA LECTURE
« La littérature pour la jeunesse est à la croisée des chemins dans mon pays », témoigne François Pango (Didactique 2005) en parlant du Gabon, où il travaille comme conseiller pédagogique. De façon générale, ce pan de l’enseignement est négligé à l’école primaire, notamment dans l’enseignement public. «Seuls les établissements privés conventionnés français ou privés laïcs offrent ces enseignements à leurs élèves.» Pour les autres, en classe d’apprentissage de français, la littérature n’est simplement pas abordée. «Dans ces conditions, les élèves lisent peu. Ils éprouvent en conséquence d’énormes difficultés à lire des œuvres littéraires lorsqu’ils abordent leurs études secondaires», confie M. Pango.
Il faut dire que l’édition gabonaise n’est pas très développée. Les écrivains locaux n’ont abordé le roman que depuis les années 1970, un peu plus depuis les années 1980, et les femmes n’écrivent que depuis les années 1990. Des œuvres pour enfants se publient rarement. De plus, on ne trouve au Gabon que deux principales maisons d’édition et le plus gros de la publication provient de l’extérieur, notamment de la France. En somme, il est très difficile de se procurer des œuvres littéraires gabonaises pour enfants. «Notre ambition étant de redynamiser cet enseignement à l’école secondaire, nous nous battons actuellement pour vulgariser la lecture littéraire dès l’école primaire.»
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LA LECTURE, UN INCONTOURNABLE EN ONTARIO
«La littérature pour enfants se porte bien chez nous», affirme Hélène Robert (Enseignement au pré-scolaire et au primaire 1988). Selon l’enseignante en quatrième-cinquième année à Windsor, en Ontario, cette vigueur doit beaucoup au programme-cadre de français qui prévaut dans les 12 conseils francophones de la province.
«Les livres pour enfants font partie intégrante des pratiques pédagogiques et de l’enseignement de la lecture au primaire», confirme-t-elle. Et la lecture est vue comme la base des apprentissages, autant dans les matières sociales que scientifiques, tout au long du parcours scolaire. «Faire des inférences ou lire entre les lignes permet aux enfants de bien comprendre et, donc, d’apprendre et de poser plus de questions», dit-elle.
Chaque année, l’Office de la qualité et de la responsabilité en enseignement fait passer aux élèves des tests de compréhension de lecture permettant de connaître les tendances et révélant les éléments à améliorer. «Les équipes-écoles comme la mienne reçoivent ces résultats et discutent des éléments à cibler, de la maternelle à la huitième année ; tous sont impliqués, car nous voyons le succès des élèves comme une démarche continue et non comme l’affaire d’une seule année.»
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«Peu d’auteurs, peu d’intérêt et une invasion de livres étrangers.» Voilà le triste constat que fait Marie-Laure Josselin (Communication publique 2002; Journalisme international 2004) sur l’état de la littérature enfantine au Sénégal, le pays où elle exerce son métier de journaliste à la pige pour Radio-Canada, RDI et Libération. Il existe des programmes de lecture publique, mais même si les enseignants sénégalais encouragent la lecture à l’école, peu de parents semblent faire de même avec leurs enfants, notamment à cause de la télévision.
Pourtant, des maisons d’édition et des auteurs de la relève se manifestent sur le terrain, telle Nafissatou Dia Diouf qui a publié Le fabuleux tour du monde de Raby en 2005. Certains auteurs s’inspirent des trésors de l’oralité africaine en reprenant à l’écrit les contes de leurs pays. Toutefois, les livres pour enfants semblent plutôt avoir une vocation pédagogique: apprendre le français. Wolof, pulaar, diola, sérère: les langues locales ont la cote dans les discussions… mais toujours pas dans les livres pour enfants, remarque Marie-Laure Josselin.
Dans une librairie d’un quartier chic de Dakar, la journaliste n’a pu dénicher qu’un seul un livre en wolof, la langue la plus parlée au Sénégal. «Et s’il est difficile de se procurer des livres sénégalais pour enfants dans la capitale, en milieu rural, c’est quasiment impossible», confie-t-elle. Les parents se souviennent bien des livres sénégalais de leur enfance, comme La belle histoire de Leuk-le-lièvre, écrit par Léopold Sédar Senghor, le poète-président. «À l’époque, tous les enfants semblaient lire ces livres mais, sur la table de chevet, Leuk a cédé sa place à Dora.»
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GABON: REDYNAMISER LA LECTURE
« La littérature pour la jeunesse est à la croisée des chemins dans mon pays », témoigne François Pango (Didactique 2005) en parlant du Gabon, où il travaille comme conseiller pédagogique. De façon générale, ce pan de l’enseignement est négligé à l’école primaire, notamment dans l’enseignement public. «Seuls les établissements privés conventionnés français ou privés laïcs offrent ces enseignements à leurs élèves.» Pour les autres, en classe d’apprentissage de français, la littérature n’est simplement pas abordée. «Dans ces conditions, les élèves lisent peu. Ils éprouvent en conséquence d’énormes difficultés à lire des œuvres littéraires lorsqu’ils abordent leurs études secondaires», confie M. Pango.
Il faut dire que l’édition gabonaise n’est pas très développée. Les écrivains locaux n’ont abordé le roman que depuis les années 1970, un peu plus depuis les années 1980, et les femmes n’écrivent que depuis les années 1990. Des œuvres pour enfants se publient rarement. De plus, on ne trouve au Gabon que deux principales maisons d’édition et le plus gros de la publication provient de l’extérieur, notamment de la France. En somme, il est très difficile de se procurer des œuvres littéraires gabonaises pour enfants. «Notre ambition étant de redynamiser cet enseignement à l’école secondaire, nous nous battons actuellement pour vulgariser la lecture littéraire dès l’école primaire.»
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LA LECTURE, UN INCONTOURNABLE EN ONTARIO
«La littérature pour enfants se porte bien chez nous», affirme Hélène Robert (Enseignement au pré-scolaire et au primaire 1988). Selon l’enseignante en quatrième-cinquième année à Windsor, en Ontario, cette vigueur doit beaucoup au programme-cadre de français qui prévaut dans les 12 conseils francophones de la province.
«Les livres pour enfants font partie intégrante des pratiques pédagogiques et de l’enseignement de la lecture au primaire», confirme-t-elle. Et la lecture est vue comme la base des apprentissages, autant dans les matières sociales que scientifiques, tout au long du parcours scolaire. «Faire des inférences ou lire entre les lignes permet aux enfants de bien comprendre et, donc, d’apprendre et de poser plus de questions», dit-elle.
Chaque année, l’Office de la qualité et de la responsabilité en enseignement fait passer aux élèves des tests de compréhension de lecture permettant de connaître les tendances et révélant les éléments à améliorer. «Les équipes-écoles comme la mienne reçoivent ces résultats et discutent des éléments à cibler, de la maternelle à la huitième année ; tous sont impliqués, car nous voyons le succès des élèves comme une démarche continue et non comme l’affaire d’une seule année.»
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