Le magazine Contact

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Printemps 2008

On cherche, on trouve

Des résultats de recherche sur la lutte au cancer grâce aux nanotechnologies, le manchot royal, le retour au travail après un épisode de maladie mentale, la sélection d'ovules pour fécondation in vitro et bien plus.

NANOMISSILES À RETARDEMENT
Par Jean Hamann

Des chercheurs du Département de chimie viennent de franchir un pas significatif vers la mise au point de nanostructures capables d’attaquer spécifiquement certaines cellules cancéreuses. L’équipe de Normand Voyer, du Centre de recherche sur la fonction, la structure et l’ingénierie des protéines, est parvenue à synthétiser un agent thérapeutique qui perfore de façon sélective la membrane des cellules cancéreuses de la prostate après être entré en contact avec elles. «Nous sommes encore bien loin de pouvoir utiliser cette approche chez l’humain, prévient M. Voyer. Par contre, c’est la première fois qu’une étude démontre qu’une nanostructure artificielle peut être activée par des cellules cancéreuses et ainsi acquérir le pouvoir de les détruire.»

Le chercheur et ses collègues Pierre-Luc Boudreault, Mathieu Arsenault et François Otis livrent les détails de leur découverte dans la revue Chemical Communications. C’est en misant sur une approche biomimétique qu’ils ont réussi à développer cet outil. «La nature fait de la nanotechnologie depuis toujours avec efficacité, dit Normand Voyer. Nous tentons de calquer sa façon de faire en assemblant des molécules qui agissent comme certains poisons naturels en perturbant la membrane des cellules.»

Un missile nommé peptide
Cette équipe de recherche avait précédemment démontré le pouvoir perforant d’un peptide créé dans son laboratoire. «Il fallait maintenant trouver une façon d’utiliser ce pouvoir contre les cellules cancéreuses sans que les cellules normales en souffrent», résume Normand Voyer.

Pour résoudre ce problème, les chercheurs ont tiré parti du fait que la membrane des cellules cancéreuses de la prostate surexprime une enzyme (la PSMA). Ils ont modifié leur peptide en lui ajoutant deux acides aminés, qui inhibent son pouvoir perforant et lui confèrent une affinité pour la PSMA. Lorsque la nanostructure croise une cellule cancéreuse, elle se fixe à la PSMA qui la scinde, réactivant le pouvoir perforant du peptide de départ. Des tests effectués in vitro ont démontré l’efficacité du procédé contre des cellules cancéreuses de la prostate.

«La prochaine étape consiste à trouver une façon de rendre la nanostructure inoffensive pour les autres cellules après son activation, souligne le chercheur. Nous croyons pouvoir y arriver en misant sur des enzymes, libérées par les cellules cancéreuses lors de leur destruction, qui la scinderaient en composés bénins.» La conception d’agents nanothérapeutiques ciblant d’autres cancers serait envisageable à condition que la membrane des cellules cancéreuses soit le site d’une activité moléculaire qui leur soit propre, précise-t-il.

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MANCHOT ROYAL: LE LANGAGE DES PLUMES

La queue du faisan et les épaulettes du carouge livrent un message clair à tout venant: «Je suis un beau mâle. Bienvenue aux dames et poussez-vous messieurs». Mais que racontent au juste les plumes d’ornement apparaissant chez les deux sexes, comme en a le manchot royal? La grandeur de la tache orangée qu’arborent mâles et femelles de cette espèce est étroitement liée à leur agressivité, rapportent Vanessa Viera et Steeve Côté, du Département de biologie, rattachés au Centre d’études nordiques, et des collègues français et américains, dans un récent numéro de la revue Ethology. Cette
tache, qui varie de 10 à 24 cm2, est in­dépendante de la taille de l’oiseau.

Les chercheurs ont observé une colonie très dense de 30 000 couples, située sur l’île de la Possession, en région subantarctique. Chaque couple y occupe un très petit territoire (0,5 m2). Le temps consacré à la défense de ce territoire, le nombre de mouvements menaçants du bec et le nombre de contacts physiques avec les autres oiseaux augmentent en fonction de la taille de la tache orangée, ont constaté les biologistes. Résultat : les manchots qui arborent une grande tache accaparent les sites de nidification situés au centre de la colonie, où ils sont davantage à l’abri des prédateurs, ce qui favorise leur succès reproducteur.

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RETOUR À LA CASE DÉPART


L’amélioration des conditions de travail joue un rôle déterminant pour un retour au travail réussi chez les personnes qui s’absentent pour des problèmes de santé mentale. C’est l’une des conclusions d’une étude menée par Louise St-Arnaud, professeure à la Faculté des sciences de l’éducation, auprès de 1850 employés de la fonction publique et parapublique des régions de Montréal et de Québec.

Près de 44% des travailleurs interviewés considéraient que leurs problèmes de santé n’étaient pas réglés lors de leur retour au travail, ce qui est classiquement associé à un risque élevé de rechute, surtout lorsque rien n’est fait pour atténuer les problèmes en cause au travail (la surcharge, selon 62% des répondants). «Ce n’est pas tout de ramener l’employé au travail, même de façon progressive, dit Louise St-Arnaud. Il faut aussi mettre le doigt sur ce qui ne va pas. Actuellement, la tendance des entreprises est de réintégrer rapidement la personne dans un contexte inchangé.»

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CHOISIR LES BONS OVLULES

Des chercheurs ont identifié des marqueurs génétiques grâce auxquels on pourrait sélectionner les ovules qui ont le plus de chances de conduire à une grossesse réussie après une fécondation in vitro. Cette méthode permettrait d’augmenter le taux de succès lorsqu’un seul embryon est transféré et, du même coup, de réduire le recours à l’implantation de plusieurs embryons. Le procédé est décrit en détail dans un article paru en ligne, en février, dans le site de la revue Human Reproduction, sous les signatures de Mélanie Hamel, Isabelle Dufort, Claude Robert, Catherine Gravel et Marc-André Sirard, du Centre de biologie de la reproduction, et de deux collègues d’Ottawa. Cette innovation vient de faire l’objet d’un dépôt de brevet mondial. Les marqueurs en question sont cinq gènes des cellules folliculaires (ou nourricières) qui entourent l’ovule lorsque celui-ci
est encore dans l’ovaire.

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J’AI POUR TOI UN LAC… POLLUÉ


Même si Schefferville a été désertée en 1982, le plan d’eau situé au cœur de cette ancienne ville minière porte encore les séquelles des négligences passées. En effet, le déversement des eaux usées de la ville et la pollution engendrée par les activités minières ont laissé dans le lac Dauriat des traces qui tardent à s’effacer: métaux, matières organiques et modification encore perceptibles des communautés d’algues, rapportent les chercheurs du Centre d’études nordiques, Laurence Laperrière et Reinhard Pienitz, avec leurs collègues canadiens et américains, dans une récente édition du Journal of Paleolimnology. Leur conclusion: l’élimination des sources de contamination ne suffit pas pour assurer le rétablissement rapide d’un lac pollué.

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L’ACTION DU LITHIUM MIEUX COMPRISE


Découvert fortuitement en 1949, l’effet thérapeutique du lithium sur les troubles de l’humeur est certain. Mais comment le lithium agit-il dans le cerveau? Des expériences menées sur des animaux de laboratoire par Martin Beaulieu, professeur à la Faculté de médecine et chercheur au Centre de recherche Université Laval Robert-Giffard, et par une équipe de l’Université Duke ont récemment montré que le produit agit sur des voies de signalisation cellulaire perturbées. Ils ont également identifié une protéine directement influencée par le lithium. Les chercheurs décrivent ce mécanisme dans l’édition du 11 janvier de la revue Cell. Leur découverte pourrait marquer le début d’une recherche de molécules capables de produire les mêmes effets bénéfiques que le lithium sans en avoir les effets secondaires. Le lithium agit sans doute sur d’autres mécanismes, prévient toutefois M. Beaulieu.

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VIVE LES MILIEUX DIVERSIFIÉS!


Contrairement à ce qu’avancent certains biologistes, la martre d’Amérique n’est pas inféodée aux vieilles forêts. C’est ce qu’a découvert Charles Vigeant-Langlois après avoir étudié pendant deux hivers les pistes laissées par ce mustélidé dans la neige fraîche de la forêt Montmorency. Le mémoire qu’il a rédigé sous la supervision d’André Desrochers et de Louis Bélanger, au Département des sciences du bois et de la forêt, apporte donc un nouvel éclairage sur le type d’aménagement forestier qu’il faut préconiser pour assurer la survie de cette espèce. Les 34 pistes de martre qu’il a cartographiées couvrent 57 km de territoire et montrent que l’animal chasse dans tout type de peuplement, pourvu qu’il y trouve lièvres et écureuils qui composent son menu. Reste que les forêts matures lui fournissent son refuge de prédilection: les arbres morts.
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