Archéologie: trois chantiers «coup de coeur»
Trois diplômés témoignent du travail qu'ils ont accompli en Syrie, en Arménie et aux États-Unis.
Par Julie Marcoux, Association des diplômés
SYRIE: LA CÉRAMIQUE À LA BARRE DES TÉMOINS
Depuis 1998, Marie-Claude Boileau (Archéologie 1997 et 2002) participe, en tant que céramologue et surveillante de chantier, à des fouilles archéologiques sur le site de Tell Acharneh. Ce projet, situé en Syrie intérieure, est dirigé par l’Université Laval en codirection avec la University of British Columbia.
D’une impressionnante superficie –70 ha ayant livré plus de 80 000 tessons de céramique à ce jour– le site témoigne d’une longue occupation au cours des âges du Bronze et du Fer (2400 à 720 avant JC) ainsi que de plus courtes durant la Première croisade (XIIe siècle) et l’époque ottomane (XVIIe siècle). «Comme cela arrive souvent en archéologie, c’est l’étude générale des tessons trouvés qui nous a permis de confirmer les différentes occupations de ce site», explique l’archéologue rattachée à la British School at Athens (Grèce).
Sur le terrain, Marie-Claude Boileau trie, étudie, catalogue et dessine les tessons recueillis à divers niveaux d’occupation. De retour en laboratoire avec certains échantillons, elle procède à leur analyse. «Je m’interroge sur les étapes de production des céramiques, sur leur circulation et sur l’organisation socio-économique et politique de la société qui les a produites et utilisées. Mon approche est essentiellement technologique, car j’étudie le processus complet de fabrication au moyen de techniques empruntées à des disciplines scientifiques, notamment à la géologie et à la chimie.»
Ses analyses lui ont permis de caractériser les pâtes utilisées pour la confection des objets en céramique et de comparer leurs composantes à la géologie de la région. Elle a ainsi pu déterminer que certaines catégories de céramique étaient produites localement, alors que d’autres avaient été importées. Elle a aussi pu identifier les techniques utilisées lors du façonnage et de la finition des pots. «L’existence, sur un même site, de diverses matières premières et techniques de façonnage témoigne du travail de différents ateliers et potiers qui interagissaient dans l’économie de la région.»
ARMÉNIE : LES PREMIERS OUTILS DÉCODÉS
Jacques Chabot (Études anciennes 1991 ; Archéologie 1993 et 1999) travaille depuis 1999 au sein de la Mission Caucase. Ce projet de fouilles en Arménie compte plusieurs partenaires internationaux, dont l’Université Laval, où il enseigne.
Dans deux villages préhistoriques (5 600 avant JC), son groupe a recueilli quelque 20 000 outils en obsidienne –du verre volcanique taillé pour obtenir des outils tranchants. Le spécialiste des outils préhistoriques en rapporte chaque année des spécimens à son laboratoire de l’Université, afin de déterminer les méthodes de fabrication et la fonction de ces objets.
«Ces sites figurent parmi les premiers villages agricoles au monde. En l’absence de connaissances métallurgiques, la meilleure façon d’obtenir un outil très tranchant était de tailler de la pierre», explique l’archéologue. Or, les résultats de ses analyses lui ont permis de faire une découverte étonnante: les outils avaient été débités par pression au levier, le summum de la taille de la pierre, une technique qu’on croyait apparue vers 3 200 avant JC en Mésopotamie. «Ceci fait reculer l’apparition de ce procédé de 2 000 ans, ce qui est une découverte majeure, s’exclame Jacques Chabot. Nous étudions les premières technologies de l’histoire de l’humanité!»
HABITATIONS CIRCULAIRES EN AMÉRIQUE
Parmi ses meilleurs souvenirs professionnels, Steve Douville (Bac général 1999 ; Archéologie 2003) retient les fouilles effectuées, en 2000 et 2001, avec une équipe d’archéologues de la Colorado State University. Le site se trouvait sur la base militaire Fort Drum (New York). Les 37 tranchées de 5m x 5m alors réalisées ont permis à son groupe d’exposer une grande partie de ce qui constituait un village de la culture de Point Peninsula. Ce groupe amérindien peuplait une partie de l’État de New York et de l’Ontario à l’époque du Sylvicole moyen (de 400 avant JC à 1000 de notre ère).
«En plus de nombreux outils de pierres et des tessons de la poterie typique de cette culture, nous avons fait la découverte de traces de pieux indiquant la présence de plusieurs habitations circulaires», explique l’archéologue qui réside maintenant en Colombie-Britannique. En raison de la très grande quantité d’éclats trouvés, différents secteurs du site ont été identifiés comme lieux de production d’outils de pierre. «Chacun était situé à l’arrière d’une habitation dont le foyer se trouvait, quant à lui, devant l’entrée, précise-t-il. De cette façon, les éclats n’étaient pas dans un endroit passant, ce qui diminuait les risques de blessures. Ceci nous indique que le site n’était pas exclusivement dédié à la production, comme c’est généralement le cas.»
L’analyse de résidus présents sur certains outils a par ailleurs fourni plusieurs informations sur le type d’alimentation et sur les espèces chassées à cette époque. C’est le cerf qui a été l’espèce animale la plus représentée.
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Depuis 1998, Marie-Claude Boileau (Archéologie 1997 et 2002) participe, en tant que céramologue et surveillante de chantier, à des fouilles archéologiques sur le site de Tell Acharneh. Ce projet, situé en Syrie intérieure, est dirigé par l’Université Laval en codirection avec la University of British Columbia.
D’une impressionnante superficie –70 ha ayant livré plus de 80 000 tessons de céramique à ce jour– le site témoigne d’une longue occupation au cours des âges du Bronze et du Fer (2400 à 720 avant JC) ainsi que de plus courtes durant la Première croisade (XIIe siècle) et l’époque ottomane (XVIIe siècle). «Comme cela arrive souvent en archéologie, c’est l’étude générale des tessons trouvés qui nous a permis de confirmer les différentes occupations de ce site», explique l’archéologue rattachée à la British School at Athens (Grèce).
Sur le terrain, Marie-Claude Boileau trie, étudie, catalogue et dessine les tessons recueillis à divers niveaux d’occupation. De retour en laboratoire avec certains échantillons, elle procède à leur analyse. «Je m’interroge sur les étapes de production des céramiques, sur leur circulation et sur l’organisation socio-économique et politique de la société qui les a produites et utilisées. Mon approche est essentiellement technologique, car j’étudie le processus complet de fabrication au moyen de techniques empruntées à des disciplines scientifiques, notamment à la géologie et à la chimie.»
Ses analyses lui ont permis de caractériser les pâtes utilisées pour la confection des objets en céramique et de comparer leurs composantes à la géologie de la région. Elle a ainsi pu déterminer que certaines catégories de céramique étaient produites localement, alors que d’autres avaient été importées. Elle a aussi pu identifier les techniques utilisées lors du façonnage et de la finition des pots. «L’existence, sur un même site, de diverses matières premières et techniques de façonnage témoigne du travail de différents ateliers et potiers qui interagissaient dans l’économie de la région.»
ARMÉNIE : LES PREMIERS OUTILS DÉCODÉS
Jacques Chabot (Études anciennes 1991 ; Archéologie 1993 et 1999) travaille depuis 1999 au sein de la Mission Caucase. Ce projet de fouilles en Arménie compte plusieurs partenaires internationaux, dont l’Université Laval, où il enseigne.
Dans deux villages préhistoriques (5 600 avant JC), son groupe a recueilli quelque 20 000 outils en obsidienne –du verre volcanique taillé pour obtenir des outils tranchants. Le spécialiste des outils préhistoriques en rapporte chaque année des spécimens à son laboratoire de l’Université, afin de déterminer les méthodes de fabrication et la fonction de ces objets.
«Ces sites figurent parmi les premiers villages agricoles au monde. En l’absence de connaissances métallurgiques, la meilleure façon d’obtenir un outil très tranchant était de tailler de la pierre», explique l’archéologue. Or, les résultats de ses analyses lui ont permis de faire une découverte étonnante: les outils avaient été débités par pression au levier, le summum de la taille de la pierre, une technique qu’on croyait apparue vers 3 200 avant JC en Mésopotamie. «Ceci fait reculer l’apparition de ce procédé de 2 000 ans, ce qui est une découverte majeure, s’exclame Jacques Chabot. Nous étudions les premières technologies de l’histoire de l’humanité!»
HABITATIONS CIRCULAIRES EN AMÉRIQUE
Parmi ses meilleurs souvenirs professionnels, Steve Douville (Bac général 1999 ; Archéologie 2003) retient les fouilles effectuées, en 2000 et 2001, avec une équipe d’archéologues de la Colorado State University. Le site se trouvait sur la base militaire Fort Drum (New York). Les 37 tranchées de 5m x 5m alors réalisées ont permis à son groupe d’exposer une grande partie de ce qui constituait un village de la culture de Point Peninsula. Ce groupe amérindien peuplait une partie de l’État de New York et de l’Ontario à l’époque du Sylvicole moyen (de 400 avant JC à 1000 de notre ère).
«En plus de nombreux outils de pierres et des tessons de la poterie typique de cette culture, nous avons fait la découverte de traces de pieux indiquant la présence de plusieurs habitations circulaires», explique l’archéologue qui réside maintenant en Colombie-Britannique. En raison de la très grande quantité d’éclats trouvés, différents secteurs du site ont été identifiés comme lieux de production d’outils de pierre. «Chacun était situé à l’arrière d’une habitation dont le foyer se trouvait, quant à lui, devant l’entrée, précise-t-il. De cette façon, les éclats n’étaient pas dans un endroit passant, ce qui diminuait les risques de blessures. Ceci nous indique que le site n’était pas exclusivement dédié à la production, comme c’est généralement le cas.»
L’analyse de résidus présents sur certains outils a par ailleurs fourni plusieurs informations sur le type d’alimentation et sur les espèces chassées à cette époque. C’est le cerf qui a été l’espèce animale la plus représentée.
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