Passion marketing
Publié le 28 mars 2012 | Par Frank Pons
Et si le retour des Nordiques ne suffisait pas?
Moi aussi, je rêve du retour des Nordiques et de pouvoir m’installer dans les sièges confortables du nouvel amphithéâtre pour partager avec mes garçons une bonne game de hockey. Comme vous, je rêve de la fièvre des séries et des rivalités Canadiens-Nordiques. Bref, comme beaucoup, mon cœur s’anime quand je pense à ce retour tant attendu, moi qui ai vu les Nordiques partir en 1995 lors de leur dernier match au Colisée. Malgré cet engouement certain, la vision et la connaissance que j’ai du contexte du sport business me force à être un peu plus pragmatique et à me poser (à tort ou à raison?) quelques questions que j’aimerais partager avec vous pour donner une autre tournure à l’éternel question de ce retour.
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L’amphithéatre, une condition nécessaire mais pas suffisante
Un cas, publié par des chercheurs de l’Université Western en 20091 et sur lequel mes étudiants travaillent dans le cadre de plusieurs de mes cours, porte sur la potentielle relocalisation des Predators de Nashville. Cette équipe de hockey présentait en 2007-2008 des pertes conséquentes et ses propriétaires ainsi que la LNH mentionnaient plusieurs villes d’accueil possibles (notamment Las Vegas, Kansas City, Houston, Hamilton et Winnipeg… des noms qui sont toujours présents dans le contexte actuel).
La plupart des étudiants qui s’y penchent avec une approche très stratégique et commerciale (dénuée de la composante émotionnelle) comprennent vite que la situation est hypercomplexe et inclut de nombreuses variables allant de l’existence d’un amphithéâtre adapté à un marché potentiel (corporatif et individuel) en passant par le potentiel en termes de commandite ou de droits télévisuels. Leurs conclusions varient grandement, mais l’existence ou la prochaine construction d’un amphithéâtre demeure une constante pour qu’une ville puisse seulement être considérée comme destination viable pour une franchise. Néanmoins, cela ne suffit pas. Et si l’on souhaite que l’arrivée de cette franchise soit synonyme de succès, il faut voir plus loin et plus grand que la seule venue d’une équipe de la LNH et c’est sur cet aspect que l’attention devrait être braquée.
Prenez l’exemple du Canadien de Montréal et de son passé récent. Il me semble qu’on oublie vite… En 1996, quand le Centre Bell est livré au coût de 235 M$ (de fonds privés), il est présenté comme le remède parfait qui va permettre au Canadien d’augmenter ses revenus, notamment par les loges corporatives. Pourtant, des années de résultats sportifs mitigés, de décisions marketing discutables et de problèmes financiers vont conduire à la vente de l’équipe ET de l’amphithéâtre (80% des parts) à George Gillett pour un maigre 275 M$. Or, en 2009, ce même George Gillett revend l’équipe, le Centre Bell et sa division spectacle pour un montant estimé de plus de 500 M$! Cherchez l’erreur pour une plus-value de 250 M$ sur 8 ans. Quel miracle s’est-il donc produit?
Le miracle peut se résumer en quelques mots: maximiser TOUTES les sources de revenus. Si George Gillett a fait beaucoup de communication sur l’équipe, car il a compris quel formidable outil de relations publiques elle représentait, il a surtout développé une division consacrée à l’organisation de spectacles (connue maintenant sous le nom d’Evenko) qui est devenue la force vive de son organisation en attirant et en produisant un grand nombre de divertissements présentés au Centre Bell et amenant le taux d’occupation à près de 70%, soit plus de 200 jours par an. Pour mémoire, on peut estimer une saison de la LNH (séries incluses) à une cinquantaine de matchs par an, ce qui est insuffisant pour assurer la pérennité financière d’une organisation.
Peut-on occuper l’amphithéâtre 200 soirs par an?
Dans le cas de Québec, la question qui se pose donc n’est pas de savoir si on peut avoir une équipe de la LNH, mais plutôt si Québec peut remplir une salle 200 soirs par an. Avec du hockey, mais surtout avec d’autres formes de divertissements qui attireront une clientèle individuelle et une clientèle d’affaires. Le fait que Quebecor, avec sa force de frappe médiatique, soit l’acteur majeur du projet est un gage important de succès pour l’organisation d’événements majeurs à Québec, mais la question de la taille du marché pour une occupation continue mérite d’être posée.
Le fait de constamment associer la venue d’une équipe de la LNH et la construction et la gestion de l’amphithéâtre ne contribue pas à clarifier la faisabilité en termes marketing et managériaux, mais elle assouvit certainement les journalistes et l’opinion publique… et nous fait tous vibrer -)). À ce stade-ci, il serait pourtant plus pertinent (comme l’a fait PKP récemment) de livrer de l’information sur le projet d’amphithéâtre lui-même (et pas seulement les éléments architecturaux), mais aussi sur les innovations technologiques de la nouvelle construction (sièges, visibilité, éléments tangibles…) et sur les projets que les futurs gestionnaires comptent lancer pour maximiser l’expérience des visiteurs, s’assurer de leur fidélité et attirer des spectacles de premier plan à Québec.
Ultimement, équipe ou pas, l’amphithéâtre sera construit et sera une partie intégrante du paysage de Québec: parlons-en, intéressons-nous-y et assurons-nous qu’il réponde à toutes les exigences actuelles des salles de spectacle et de sport, car c’est le nerf de la guerre et la seule partie que l’on contrôle vraiment dans la venue d’une équipe -))). C’est aussi ce qui générera des revenus à long terme. Nous sommes tous un peu des investisseurs forcés dans ce projet (amphithéâtre) financés par des fonds publics, alors essayons de mieux comprendre comment cet investissement peut être rentable. Et posons les bonnes questions sur ce qui se réalise et non sur ce qui pourrait arriver (équipe).
Tout vient à point qui sait attendre
Pour conclure (et revenir sur cette fameuse équipe que nous attendons tous), la patience semble être une des vertus obligatoires pour pouvoir faire des affaires avec la LNH. En effet, après s’être brûlées avec des expansions ou des relocalisations, la LNH et toutes les autres ligues comme la MLS sont très méticuleuses et patientes dans leurs décisions et sont prêtes à jouer les prolongations et à donner toutes les opportunités à une franchise avant de déménager. Le cas précédent de Nashville en 2008 est un excellent exemple où, malgré des options très attirantes, l’équipe est restée au Tennessee et a fait tous les efforts (avec succès) pour s’y implanter plus durablement. La LNH a une aversion pour le risque et Québec se doit d’être patiente, sérieuse et cohérente. Mais ça, le maire et les gens impliqués dans le projet semblent enfin l’avoir compris, la victoire (comme pour Winnipeg) n’en sera que plus belle quand on la savourera.
1 Cotte, June et Jamie Duncan, Nashville Predators: Marketing Strategy for an NHL Franchise, The University of Western Ontario, Richard Ivey School of Business, 2009 ↩
Publié le 12 juillet 2013 | Par andre beaudoin
Publié le 22 avril 2012 | Par Frank Pons
Publié le 20 avril 2012 | Par Bertrand Haubert
J'espère seulement que les stratégies entourant l'expérience client ne se limiteront pas seulement aux amateurs de Québec et que la diaspora «Nordiques», dont je fais partie depuis Ottawa, saura nous inclure! Je suis certain qu'il y a quelques chose de profitable à faire sur le plan marketing en arrachant de leur misère tous ceux qui ont dû se tourner par défaut vers d'autres équipes; pour l'amour du sport.
Publié le 4 avril 2012 | Par Frank pons
J'espère que tout marche pour toi à l'ÉQUIPE... vous viendrez peut-être faire un reportage à Québec quand les Nordiques seront là -))
Publié le 2 avril 2012 | Par Xavier Audebert
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