Impressions d'architecture
Publié le 2 juillet 2015 | Par Martin Dubois
S’approprier la rue, prise 2
L’émergence de plusieurs manifestations citoyennes ou de projets d’art public urbain m’avait inspiré un billet sur ce sujet l’été dernier. Pensons, entre autres, au stationnement pour piétons de la 3e Avenue à Limoilou, aux cabanes à bouquins dans les escaliers reliant la haute et la basse-ville ou aux œuvres éphémères des passages insolites dans le Vieux-Port. De nouveaux projets aussi inspirants prennent actuellement d’assaut plusieurs espaces publics et m’incitent à récidiver sur ce thème, tellement ils apportent un vent de fraîcheur dans la ville. Cet engouement pour l’appropriation des espaces urbains est un phénomène international qu’on peut voir aussi à Montréal, à New York et à Berlin. Faisant une belle place aux créateurs locaux, ces projets permettent une mise en valeur des endroits sous-exploités, souvent dédiés exclusivement à la voiture, pour en faire des lieux événementiels, le temps d’un été… en souhaitant que la démonstration du potentiel de ces lieux donne naissance à des aménagements permanents accessibles au plus grand nombre.
La plaza Limoilou
Fort du succès du stationnement pour piétons aménagé l’an dernier, les Limoulois ont sauté à pieds joints dans l’aventure d’une nouvelle place publique au cœur de leur quartier. La genèse du projet remonte à l’automne dernier alors que la population du quartier a été appelée à réfléchir collectivement au développement de son milieu de vie par l’entremise d’une consultation en ligne de la plateforme Votepour.ca. Il en est ressorti que la population du Vieux-Limoilou souhaitait une place publique dont la vocation serait surtout événementielle et artistique. Il n’en fallait pas plus pour que le projet prenne forme au carrefour du chemin de la Canardière, de la 3e Avenue et de la 6e Rue. Conçue par EXMURO, l’architecte Érick Rivard et des artistes locaux, cette place temporaire, qui a nécessité la fermeture d’un tronçon de la 6e Rue, a été aménagée pour un coût de 100 000$. Bancs ceinturant la place pour délimiter l’espace piéton, scène agrémentée d’un minigolf, kiosque à lecture de même que chaises et tables protégées par des parasols sont reliés entre eux par des marques multicolores peintes au sol ainsi que par des sculptures aériennes composées de seaux métalliques. Gageons que cette plaza déjà très fréquentée, autant comme lieu de détente et de rencontre que pour assister à de petits spectacles, se transformera en place permanente l’année prochaine.
Un SPOT à découvrir
Le SPOT, la Sympathique place ouverte à tous, a créé tout un événement depuis son inauguration le 19 juin. Imaginé et animé par des étudiants de l’École d’architecture de l’Université Laval en collaboration avec 5 firmes d’architectes, cet espace prend place dans la cour et le stationnement de l’ancien complexe funéraire Lépine Cloutier, acquis récemment par le créateur Olivier Dufour qui a le projet d’en faire la centrale créative Le réacteur. Adossée à la falaise près des bretelles de l’autoroute Dufferin-Montmorency, cette nouvelle place publique se veut un espace de rencontre et un pôle innovant dans le bouillonnant quartier Saint-Roch. La place est aménagée sous le thème du terrain de jeu: carré de sable prenant la forme d’une piscine, jeu de marelle géant peint au sol menant au restaurant mobile le Paradis, mur d’entrée de la rue Saint-Vallier Est confectionné à partir de hula-hoops et plafond de vire-vent insufflent un brin de folie à cet espace. Des palettes de bois et des matériaux recyclés sont habilement transformés en mobilier urbain et en bar.
Rendu possible notamment par du sociofinancement –une nouvelle façon de financer des initiatives de ce genre–, le SPOT propose tout au long de la saison estivale différentes activités pour inciter les gens du quartier et des environs à investir cet endroit mésestimé. Au menu: cuisine de rue, cinéma en plein air et spectacles en tous genres. Une belle façon de sensibiliser tout un chacun aux possibilités qu’offre ce genre d’espace sous-utilisé et à la créativité des architectes de Québec.
Passages insolites
De retour cette année avec 2 fois plus de stations que l’été dernier, le parcours urbain et artistique Les passages insolites compte une fois de plus sortir des sentiers battus et engendrer de l’inédit et du surprenant grâce aux œuvres éphémères de 12 artistes d’ici et d’ailleurs. Ces installations artistiques extérieures prenant la forme de sculptures ou de projections vidéo sèment la curiosité et la surprise dans le Vieux-Port et le quartier Petit-Champlain. L’événement, qui a lieu du 2 juillet au 2 novembre, est piloté par EXMURO et financé par la Ville de Québec. Les 12 œuvres, dont 3 sont de retour pour la 2e année et 9 sont inédites, animent donc le quartier touristique dans un esprit ludique et parfois loufoque. Cette belle vitrine pour l’art urbain et la culture locale démontre une fois de plus l’impressionnant bassin créatif de la capitale.
Prenez place
Le collectif Le Banc présente quant à lui «Prenez place», une installation conçue en mode participatif avec la collaboration de la table de quartier l’EnGrEnAgE de Saint-Roch. Installé sur le parvis de l’église Saint-Roch, entre les rues Saint-Joseph Est et Saint-François Est, le projet est issu d’une démarche de consultation au cours de laquelle les résidents et les visiteurs du quartier ont eu l’occasion de voter pour des projets inspirants pour le parvis, puis de se joindre à une activité de design participatif. Les usagers ont ainsi pu communiquer leurs préoccupations, leurs besoins et leurs envies en ce qui concerne l’aménagement estival de cette place déjà très fréquentée au cœur du quartier.
Le mobilier conçu par le collectif répond ainsi à l’aspiration citoyenne d’un parvis plus vert, avec de nombreuses places où s’asseoir confortablement et profiter des musiciens qui s’installent au piano qui faisait déjà la joie des mélomanes l’été dernier. Les plateformes posées sur les marches du parvis offrent également un lieu convivial pour partager un repas, relaxer, jaser, se faire dorer au soleil ou simplement observer la faune urbaine. C’est à partir de palettes de bois, comme au SPOT, que ce mobilier urbain éphémère vient rehausser l’espace. Un projet tout simple, mais combien efficace!
Où tu vas quand tu dors en marchant?
Je ne saurais clore ce billet sans vous dire tout le bien que je pense du parcours déambulatoire Où tu vas quand tu dors en marchant? du Carrefour international de théâtre de Québec qui a eu lieu 3 fins de semaine consécutives à la fin mai et au début juin. Je suis un fan fini depuis plusieurs années de cet événement qui exploite avec brio des lieux insolites pour les montrer sous un autre jour (ou plutôt une autre nuit…).
Cette année, l’un des derniers secteurs du Vieux-Québec à ne pas être mis en valeur, le parc de l’Artillerie et le secteur de l’ancienne école Saint-Louis-de-Gonzague, de part et d’autre du mur de fortification, a été pris d’assaut par plusieurs artistes dans 5 tableaux tous plus originaux les uns que les autres. Ce qui me frappe toujours dans cet événement, c’est sa capacité à tirer parti de lieux méconnus ou sous-exploités, de les transformer, de les faire découvrir ou redécouvrir. Si vous l’avez manqué, vous pourrez vous reprendre l’an prochain, car le parcours sera le même avant d’investir, l’année suivante, d’autres lieux insolites.
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